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— Eh bien, alors, écoutez-moi ; le bateau part à une heure, soyez à bord dès le matin à neuf heures. Vous garderez votre canot et si vous n’êtes pas satisfait de mes adieux quand je vous les enverrai, vous reviendrez et vous chercherez Catriona tant qu’il vous plaira. »

Je ne pus rien obtenir de plus et je pris le parti de me résigner à attendre.

Le jour de notre séparation arriva ; nous avions l’un pour l’autre une véritable amitié, je lui avais beaucoup de reconnaissance, et la manière dont nous devions nous quitter me tourmentait et m’empêchait de dormir, de même que le chiffre des étrennes à laisser au personnel de la maison. Je savais qu’elle me trouvait timide, j’aurais voulu me hausser dans son opinion, sous ce rapport. Après nos bonnes relations, d’ailleurs, la raideur ne me semblait pas de mise.

Je pris donc mon courage à deux mains, et, ayant préparé ma phrase depuis la veille, je lui demandai la permission de l’embrasser.

« Vous vous oubliez étrangement, monsieur Balfour, dit-elle en réponse, je ne me souviens pas de vous avoir donné le droit de me parler ainsi. »

Je restai devant elle comme une horloge arrêtée, je ne savais que penser, quand tout à coup, elle m’entoura de ses bras et m’embrassa de tout son cœur.

« Ô inimitable baby ! s’écria-t-elle, pensiez-vous que je vous laisserais partir comme un étranger ! Parce que je ne puis vous regarder sans rire, vous ne devez pas croire que je ne vous aime pas. Maintenant, il me reste un conseil à vous donner pour terminer votre éducation. Ne demandez jamais rien à une femme, elles sont obligées de dire non. Mais Dieu n’a pas encore créé une femme qui sache résister à la tentation. Vous n’ignorez pas que les théologiens estiment que c’est la malédic-