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mes jambes ; la pluie avait quelque peu lavé le haut de ma personne, mais l’eau ruisselait de mes vêtements trempés, j’étais couvert de boue jusqu’aux genoux et je devais avoir l’air d’un spectre. J’aurais eu certainement plus grand besoin d’un lit et de vêtements secs que de tous les biens de la chrétienté ! Cependant, persuadé que la première chose à faire était de me montrer en public, j’ouvris la porte de l’église suivi de Duncan tout aussi crotté que moi, et avisant une place vide, je me laissai tomber sur un banc.

Le sermon était en anglais à cause des Assises ; les juges, en effet, étaient présents avec les gens de leur suite, les hallebardes brillaient dans un coin près de la porte et les sièges étaient encombrés par les hommes de loi et les magistrats de tout ordre.

« Treizièmement, mes frères, et par parenthèse, la loi elle-même doit être regardée comme un moyen de salut », disait le ministre, comme un homme enchanté de poursuivre son argumentation. Le texte était tiré de l’Épître aux Romains, chapitre cinquième, verset treizième.

Toute cette savante assemblée, depuis Argyle et les lords Elchies et Kilkerran jusqu’aux hommes d’armes qui les accompagnaient, était plongée dans une profonde attention.

Le ministre et ceux qui étaient près de la porte remarquèrent notre entrée, mais l’oublièrent aussitôt ; les autres ne virent rien ou feignirent de ne s’apercevoir de rien, ce qui fait que je restai entre mes amis et mes ennemis, également ignoré des uns et des autres.

La première personne que je distinguai fut Prestongrange : il était en avant, se tenant droit sur sa chaise comme un cavalier bien en selle et remuant ses lèvres avec satisfaction ; ses yeux ne quittaient pas le ministre, dont la doctrine était visiblement de son goût. Charles Stewart, de l’autre côté, s’était endormi ; il avait l’air