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le digne homme ! Mais pensez donc un peu au procureur fiscal auquel vous avez eu déjà affaire, sans doute. »

Cela était vrai et Sandie se trouvait un peu déconcerté.

« Eh bien, Edie, demanda-t-il, que prétendez-vous faire ?

— Simplement ceci : mon bateau allant plus vite, je vais revenir à North Berwick et vous laisser ici surveiller le fantôme. Si je ne trouve pas Lapraik chez lui, je vous rejoindrai et tous les deux nous aurons une conversation avec lui. Mais si Lapraik est à la maison, je hisserai un pavillon à mon bateau, dans le port et vous pourrez essayer votre fusil sur le fantôme. »

Ainsi fut-il convenu. Je n’étais qu’un enfant et j’obtins de rester avec Sandie, car je croyais ainsi mieux voir ce qui se passerait. Mon grand-père donna à Sandie un projectile en argent pour ajouter aux balles de plomb, comme ayant plus d’action sur les revenants. Et alors, l’un des bateaux prit la route de North Berwick, tandis que l’autre restait mouillé et observait le malencontreux personnage qui dansait sur la pelouse.

Tout le temps que nous fûmes là, il ne cessa de s’agiter, de sauter, de tourner comme un toton et nous entendions le tapage qu’il faisait. J’avais vu des jeunes filles danser des nuits entières, mais elles étaient en compagnie et ce corps étrange était tout seul ; les danseuses avaient un joueur de violon au coin de la cheminée pour les exciter, mais ici, pour musique, il n’y avait que les cris des oiseaux. Les filles étaient jeunes et la vie circulait dans leurs membres et dans leurs veines ; au contraire, ce corps était celui d’un homme âgé déjà et obèse. Vous me jugerez mal si vous voulez, mais je dirai ce que je pense : C’était de la joie qu’éprouvait cette créature ; la joie de l’enfer, je le veux bien, mais enfin, de la joie. Bien souvent, je me suis demandé pourquoi les sorciers et les sorcières vendent leur âme (ce qu’elles ont de