rien, il lisait chaque jour sa Bible et aimait à converser sur la religion avec une tendance aux exagérations caméroniennes. Sa morale était plus douteuse, je m’aperçus qu’il faisait de la contrebande et se servait des ruines de Tantallon comme d’un magasin pour ses marchandises. Quant aux « jaugeurs », je ne crois pas qu’il évaluât leur vie à plus d’un demi-liard. Il est vrai que cette partie de la côte de Lothian est encore de nos jours une des plus sauvages de l’Écosse et les rares individus qui l’habitent sont les pires brutes.
Il arriva bientôt un incident qui eut plus tard de graves conséquences : Un vaisseau de guerre stationnait à cette époque dans le Firth, le Cheval Marin, capitaine Palliser ; il croisait pendant le mois de septembre entre Fife et Lothian pour sonder les récifs. Un beau matin, nous l’aperçûmes à environ deux milles de nous vers l’Est ; on avait mis une chaloupe à la mer pour examiner les rochers de Wildfire et de Satan’s Busch, les principaux récifs de la côte. Un peu plus tard, ayant repris la chaloupe à bord, le vaisseau s’avança vent arrière et gouverna droit sur le Bass. Cette manœuvre ne plut nullement à Andie et aux Highlanders ; ma séquestration devait rester secrète et si un officier de marine venait à débarquer dans l’île, elle pouvait rapidement devenir publique. Quant à moi, je ne voyais pas trop comment la venue d’un navire de guerre pourrait améliorer ma situation, je ne me sentais pas, comme Alan, des dispositions pour me battre malgré tout et un contre trois. Aussi, tout considéré, je promis obéissance et fidélité à Andie et nous montâmes tous au sommet du roc, pour observer ce qui allait se passer. Le Cheval Marin mit le cap sur nous comme s’il voulait toucher l’îlot et nous pûmes voir l’équipage à son poste et écouter les chants du pilote. Tout à coup, le bateau envoya une bordée de coups de canon, le rocher en parut ébranlé, la