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Andie Dale (le préfet du Bass, comme je le baptisai plaisamment) était à la fois le berger et le garde-chasse de ce riche domaine. Une douzaine de moutons s’engraissaient sur les pentes gazonnées et avaient l’air de bêtes paissant sur le toit d’une cathédrale. Il avait aussi la libre disposition des « fous » qui couvrent perpétuellement le roc et qui lui valaient de beaux bénéfices ; les jeunes sont un manger délicat, dont le prix atteint deux shillings, les plumes et la graisse de ces palmipèdes sont aussi une source de revenu. De nos jours encore, une partie des appointements du ministre de North Berwick est fournie de la sorte et c’est une paroisse très enviée. Pour s’occuper de ces différents commerces aussi bien que pour sauver les « fous » des tentatives de braconnage, Andie passait souvent plusieurs jours dans l’île, et nous le trouvâmes installé comme le serait un fermier ordinaire.

Il nous pria de l’aider à transporter les bagages, ce que je m’empressai de faire, et nous fit entrer par une petite barrière qui conduisait à l’ancienne habitation du gouverneur. Un lit de camp dans la principale pièce et des cendres dans la cheminée indiquaient que c’était là qu’il avait élu son domicile. Il m’offrit ce lit, ajoutant qu’il voyait bien que j’étais de noble origine.

« Mon origine n’a pas de rapport avec l’endroit où je couche, répondis-je ; avant ce jour, j’ai, Dieu merci, couché sur la dure et je puis faire de même ; tant que je serai ici, monsieur Andie, si tel est votre nom, j’entends assumer ma part du service et prendre place au milieu de vous, et je vous demanderai en retour de m’épargner vos plaisanteries, qui, je l’avoue, ne me plairaient guère. »

Il grommela quelque chose en réponse à ce discours, mais, après réflexion, sembla pourtant l’approuver. C’était un homme de bon sens, un bon whig presbyté-