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qu’ils fussent en train de battre ce bois. Ce doivent être des Highlanders, des hommes de Fraser, je suppose, et quelques-uns de ceux de Gregara ; or, je sais que tous, et surtout les Gregara, sont des gaillards expérimentés et habiles. Un homme, voyez-vous, ne sait rien avant d’avoir conduit un troupeau de bétail avec des habits rouges à sa poursuite. C’est ainsi que j’ai acquis pas mal de mon expérience. C’est une meilleure école que la guerre, qui est une drôle d’affaire, par exemple ! Les hommes de Gregara, donc, ont beaucoup de pratique.

— Je reconnais que c’est là une branche d’éducation qui a été négligée chez moi.

— On s’en aperçoit ! Mais l’étonnant avec vous, gens instruits, c’est que vous êtes ignorants sans vous en douter ; moi, au contraire, pour le grec et l’hébreu, je ne puis oublier ma nullité ; voilà la différence entre nous. Maintenant, vous voilà couché dans ce bois et vous croyez être débarrassé de ces Fraser et de ces Mac Gregor. Pourquoi ? Parce que je ne les vois pas, dites-vous ; mais, nigaud, c’est là leur force !

— Mettez les choses au pire si vous voulez : que faut-il faire ?

— C’est ce que je me demande. Nous pouvons nous séparer, d’abord, ce qui ne serait guère de mon goût, et du reste, j’y vois des inconvénients : il fait bien noir, et il nous sera de toute façon bien difficile de leur échapper ; si nous demeurons ensemble, nous ne formons qu’une ligne, mais si nous nous séparons, nous en formons deux, c’est-à-dire que nous leur donnons une chance de plus. Ma seconde raison est celle-ci : s’ils nous cherchent, il se peut qu’ils nous trouvent, n’est-ce pas ? et alors, je ne serais pas fâché de vous avoir pour second ; je pense aussi que vous ne vous trouverez pas mal de m’avoir à vos côtés. Je crois donc que nous devons immédiatement quitter ce bois et prendre à l’Est,