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LVL.

LE RENARD ET LE BOUC.


Un vieux bouc, vrai Nestor à l’austère figure,
Passait, parmi les siens, pour un sage docteur :
Sa longue barbe, son allure,
Ses bons mots pleins de sens, son air de sénateur
Commandaient le respect. On le nommait arbitre,
Chaque fois que parmi sa gent
Éclatait quelque différend.
S’il fallait tenir un chapitre
C’était encore lui qu’on faisait président.
En un mot, ce vieillard cumulait plus d’un titre
À pas lents et comptés regagnait son étable,
Tout en gesticulant un discours remarquable
Sur le flambeau des nuits, pâle, silencieux,
Promenant de ses feux la lueur admirable ; —
Il vint à passer près d’un puits
Où le renard se trouvait pris.
Le drôle avait été séduit par l’apparence
De la blonde Phébé, dont la circonférence
Offrait les contours arrondis
D’un vrai fromage d’Angleterre,
Succulent, tentateur, au fond de cette eau claire.
— « Que faites-vous ici ?… lui cria d’un air fin,
« Le vieux bouc. Votre Seigneurie
« Prendrait-elle à cette heure un bain ?…