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— « Coquin ! dit le lion, le poil droit, l’œil sanglant,
« Je châtirai ton impudence.
« Quoi !… tu me donnerais la plus petite part
« À moi lion ?… Meurs, traître !… Allons, maître renard
« Montrez-moi votre savoir-faire. »
— « Sire, répond renard saluant jusqu’à terre,
Le partage qu’a fait
« Cet imbécile de baudet,
« Ce pelé, ce galeux d’une crasse ignorance,
« En usages de cours, certes, serait parfait,
« — Au moins d’après ma conscience —
« S’il vous eut présenté tout le daim à la fois,
« Sans s’être gardé même un seul poil de la prise.
« Je m’appuie en ceci sur l’esprit de nos lois
« Déclarant que le bénéfice
« De petite ou grosse entreprise
« En premier lieu revient aux rois.
« Ainsi, par conséquent, c’était à vous le choix.
« Que dis-je, sur le daim seul vous aviez des droits,
« Et j’avoue humblement que, suivant la justice,
« Vous fîtes sagement d’étrangler ce butor.
« Ce partage insolent méritait bien la mort. »
— « Mon ami, je vous félicite, »
Reprit sire lion, en lui donnant soudain
Une grosse moitié du daim ;
« J’admire tellement votre rare mérite
« Que dès aujourd’hui de ma cour
« Je vous fais premier dignitaire.
« Vos arrêts seront sans retour.