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LES DEUX VOISINS.

Le voisin Pierre venait-il à passer à son tour nonchalamment étendu dans une élégante voiture, traînée par un cheval fringant, il se permettait un affreux calembourg :

Pierre qui roule n’amasse pas mousse.

Quelqu’un lui reprochait-il amicalement de s’occuper des plus rudes travaux ; cette fois, le voisin Jean-Baptiste lâchait deux proverbes :

Tant vaut l’homme, tant vaut la terre.

Il n’y a pas de sots métiers, il n’y a que de sottes gens.

Quand il recevait le revenu de ses fermes, il disait invariablement : « Comme on fait son lit, on se couche, » et bien d’autres que nous passons, car il en avait la tête farcie, et s’efforçait de les mettre en pratique, jugeant fort à propos que si les proverbes sont la sagesse des nations, ils doivent devenir et ont parfaitement le droit de demeurer la règle de conduite d’un simple particulier.

Tel était le secret du bonheur et de la prospérité de ce cher voisin Jean-Baptiste.

Il n’en était pas tout-à-fait de même chez le voisin Pierre qui jouissait d’un revenu beaucoup plus considérable, car, si ma mémoire est fidèle, il avait au moins cinq cent livres sterling par an.

Il est vrai de dire que le voisin Pierre pratiquait l’inverse du voisin Jean-Baptiste.

Avant d’aller plus loin, je m’aperçois que j’ai omis un point important dans cette très-véridique histoire.

Je me hâte de réparer cet oubli.

Par une coïncidence assez remarquable, les deux