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LES TROIS SOUHAITS

Ça ne sert plus de rien aujourd’hui ; mais naguères,
Dans ce cher bon vieux temps, — le temps de nos grands-pères,
Ils auraient pu servir, si tu les avais faits.
Alors, vois-tu, ma femme, on rencontrait des fées
Au cœur d’or, au bras long, qui parfois visitaient
Les pauvres gens dans leurs chaumières enfumées,
Et leur donnaient souvent tout ce qu’ils souhaitaient.
C’était plaisir de vivre en ces bonnes années.

— Mais le bon temps passé pourrait bien revenir ?

— Oh ! que non !… N’en crois rien… Nous avons eu, ma chère,
Trop de maux à la fois : l’Anglais après la guerre,
La politique, et puis… c’est à n’en pas finir.
Dimanche, le curé n’a-t-il pas dit au prône,
Que les gens d’aujourd’hui se damnent sans retour,
Par leur impiété qui s’accroît chaque jour,
Par leur luxe insolent, leur cœur froid à l’aumône ?…

— Sainte Mère de Dieu ! dans quel temps vivons-nous ?

Il se fit un silence, et les pauvres époux
Regardaient tristement brûler le feu dans l’âtre
Reflétant, sur leurs traits, une clarté rougeâtre,
Quand soudain apparut, à leurs yeux étonnés
Une fée à l’œil doux et qui leur dit : tenez,
Braves gens, j’ai surpris votre simple langage,
Je l’aime et je vous aime ; or, que souhaitez-vous ?
Formulez trois souhaits, je les exauce tous,
Car vous avez encor les vertus d’un autre âge.
Ainsi donc trois souhaits, mais rien que trois… Bonsoir !