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LES TROIS VÉRITÉS.

Quand il fut sur son départ, l’hôtelier le pria d’accepter une bourse de soie bien garnie, et Jean plus heureux qu’un roi reprit gaiement la route qui devait le mener ce soir même à son village, se promettant bien qu’aussi longtemps qu’il vivrait, il ne se mêlerait jamais des affaires des autres.

La nuit tombait quand Jean aperçut le clocher natal. À cette vue des pleurs involontaires mouillèrent ses yeux. Il y avait déjà treize ans qu’il ne le voyait plus.

Comme il était tard et que Jean ne voulait pas surprendre sa femme et son fils, il se dirigea tout droit chez le savetier, son voisin, qui demeurait en face.

Ce savetier, bavard comme plusieurs pies, connaissait beaucoup mieux les affaires d’autrui que les siennes. Jean ne pouvait donc tomber mieux pour avoir des renseignements sur sa femme et sur son fils.

Aussi fut-ce la première question qu’il lui fit en se mettant à souper, et Jean Lafortune apprit avec un sensible plaisir, par la bouche du digne homme, que sa femme était un modèle de vertu, que pendant sa longue absence les plus mauvaises langues n’avaient jamais eu gros comme la tête d’une épingle à dire sur son compte, etc., bref, un éloge sans pareil.

Le savetier lui apprit en sus que son fils était à la veille d’être ordonné prêtre.

Jean n’ayant pas fermé l’œil la nuit précédente, avait naturellement sommeil. Il n’eut pas plus tôt fini de souper qu’il monta dans l’unique chambre du haut où l’attendait une robe de cariole qui lui servirait de lit pour la nuit.

Jean se déshabilla donc et pliait avec soin son capot