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LA CHASSE GALERIE

J’en avais bien lampé une demi-douzaine de petits gobelets, pour ma part ; et sur les onze heures, je vous l’avoue franchement, la tête me tournait, et je me laissai tomber sur ma robe de carriole pour faire un petit somme, en attendant l’heure de sauter à pieds joints, par-dessus la tête d’un quart de lard, de la vieille année dans la nouvelle, comme nous allons le faire ce soir sur l’heure de minuit, avant d’aller chanter la guignolée et souhaiter la bonne année aux hommes du chantier voisin.

Je dormais donc depuis assez longtemps, lorsque je me sentis secouer rudement par le boss des piqueurs, Baptiste Durand, qui me dit :

— Joe, minuit vient de sonner, et tu es en retard pour le saut du quart. Les camarades sont partis pour faire leur tournée, et moi je m’en vais à Lavaltrie voir ma blonde. Veux-tu venir avec moi ?

À Lavaltrie ! lui répondis-je, es-tu fou ? Nous en sommes à plus de cent lieues. Et d’ailleurs, aurais-tu deux mois pour faire le voyage, qu’il n’y a pas de