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Lettres

entièrement à son aise. Les heures les plus délicieuses de ma vie, je les ai passées avec lui et avec les belles femmes de son pays. Il faudroit être fou pour trouver quelque chose à redire en lui ou en elles. — Là, j’ai vu la charmante veuve Moor, avec laquelle je voudrois passer le reste de mes jours, si les lois ne m’assignoient un autre terrain. — La jolie Gore, avec sa belle taille et sa figure grecque : elle est née, j’en suis sûr, pour faire le bonheur d’un homme qui saura connoître le prix d’un cœur tendre. — Je ne dois pas oublier une autre veuve, l’intéressante madame Vesey avec sa belle voix et ses cinquante autres perfections. — Moi les railler ! — C’est une chose qu’on ne peut ni dire ni croire, parce qu’elle est fausse et invraisemblable. — À la vérité j’ai parlé d’elles pendant une heure ; mais sans mêler à mes discours rien qui sentît l’épigramme ou le sarcasme. — J’ai parlé d’elles comme elles auroient pu désirer que j’en parlasse, — le sourire sur les lèvres, l’éloge dans la bouche, la joie dans le cœur et le verre à la main. — D’ailleurs je suis moi-même leur compatriote : — mon père a été long-temps de garnison en Irlande, avec son régiment ; et ma mère y étoit avec lui lorsqu’elle me mit au