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Sa fortune s’élève insensiblement sur l’inexpérience de la jeunesse ou sur la bonne foi et l’honnêteté d’un ami qui lui auroit confié sa vie. La vieillesse s’approche, le repentir lui fait tourner les yeux sur ses projets infâmes, et le place vis-à-vis de sa conscience. Elle fixe les lois avec attention, et n’en trouve aucune lésée par ses actions. Elle ne voit aucune amende, aucune forfaiture encourue. Elle n’aperçoit aucun fléau déployé se balançant sur sa tête, aucun cachot ouvert sur ses pas ; qu’y a-t-il donc pour l’effrayer, cette conscience ? Elle s’est retranchée en sûreté derrière la lettre de la loi, elle s’y est fortifiée de rapports et d’analogies ; couverte de ce rempart, elle est inaccessible à tous les reproches : l’honneur tonne et foudroie ; elle est inattaquable dans ce fort.

Celui-ci méprise les petites ressources ; il passe par-dessus les pratiques d’une basse chicanne ; il laisse les artifices douteux, et les menées qui vont en secret à la réussite : voyez le scélérat tête nue ; comme il trompe, ment, se parjure, vole, assassine. Oh l’horreur ! jamais cependant il n’exista un plus saint homme. Le prêtre qui a pris à forfait sa conscience lui a enseigné à courir d’un temple à l’autre, à faire mille signes de croix,