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et le fils d’un trépas certain, et qu’il dut être soupçonné la dernière cause d’un accident aussi triste, cependant cette mère passionnée l’accusa dans son premier transport d’être l’auteur de ses infortunes, comme s’il avoit fait descendre le malheur sur une maison qui lui avoit prêté un secours hospitalier. Le prophète étoit trop saisi de compassion pour répondre à une accusation aussi dure. Il prit l’enfant de dessus le sein de sa mère y le coucha dessus son lit, et s’écria : « Ô seigneur, mon Dieu ? as-tu affligé ainsi La veuve qui m’a reçu, en lui enlevant son fils, est-ce la récompense de sa charité et de sa bonté ? Tu lui as d’abord dérobé la compagne chérie de sa joie et de ses chagrins, et à présent qu’elle est veuve, et qu’elle doit le plus s’attendre à ta protection, vois, tu viens de faire tomber le seul appui qui restoit à sa vieillesse : ô mon Dieu ! je t’en supplie, que son fils soit rendu à la vie ».

La prière étoit fervente ; elle annonçoit la détresse d’un homme profondément blessé de la douleur de son semblable ; et le cœur d’Élisée étoit encore déchiré par d’autres passions : il étoit jaloux du nom et de la gloire de son Dieu, et il croyoit que non-