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jamais jouir de la plénitude du bonheur, et de cette température égale qui le constitue.

Il ne se trouve que dans la religion, la conscience et la vertu, et l’espoir d’une autre vie. Cet espoir enrichit tous nos projets sans nous faire craindre aucune disgrâce : il est fondé sur un rocher dont la base est aussi profonde que celle du ciel et de l’enfer. Quelques-uns parmi nous, dans le pèlerinage de la vie, ont été assez heureux pour trouver sur leur chemin une fontaine limpide qui a étanché, pour un moment, la soif ardente du bonheur ; mais notre Sauveur qui connoissoit si bien le monde, quoiqu’il n’en jouit pas, nous apprend que quiconque boira de cette eau sera encore altéré ; l’expérience nous atteste cette vérité, la raison nous la confirme à jamais, et Salomon devient encore l’exemple des hommes.

Jamais alchimiste pâle et desséché ne chercha avec plus de travaux et d’ardeur la pierre qui devoit l’enrichir que ce grand homme, le bonheur. Il étoit un des plus savans observateurs de la nature, il avoit en lui tous les pouvoirs et toutes les instructions, et cependant après mille spéculations vaines, nous l’entendons affirmer qu’il n’avoit pu extraire le bonheur du creuset de ses expériences,