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coup, mais encore valoit-elle quelque chose… Et quand quelques paroles peuvent soulager la misère, je déteste l’homme qui en est avare…

Je dis à monsieur Dessein, en appuyant le bout de mon index sur sa poitrine : En vérité, si j’étois à votre place, je me piquerais d’honneur pour me défaire de cette désobligeante ; elle doit vous faire des reproches toutes les fois que vous en approchez.

Mon Dieu ! dit monsieur Dessein, je n’y ai aucun intérêt… Excepté, dis-je, l’intérêt que des hommes d’une certaine tournure d’esprit, monsieur Dessein, prennent dans leurs propres sensations… Je suis persuadé que pour un homme qui sent pour les autres aussi bien que pour lui-même, et vous vous déguisez inutilement ; je suis persuadé que chaque nuit pluvieuse vous fait de la peine… Vous souffrez, monsieur Dessein, autant que la machine.

J’ai toujours observé, lorsqu’il y a de l’aigre doux dans un compliment, qu’un Anglois est en doute s’il se fâchera ou non. Un François n’est jamais embarrassé : monsieur Dessein me salua.

Ce que vous dites est bien vrai, monsieur, dit-il ; mais je ne ferais dans ce cas-là que changer d’inquiétude, et avec perte. Figurez-