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père… » Que la bénédiction céleste soit ton éternel partage, ô précieuse fille de mon cœur !

Mon sang est parfaitement arrêté, et je sens renaître en moi la vigueur, principe de la vie. Ainsi, mon Eliza, ne sois point alarmée… Je suis bien, fort bien… J’ai déjeûné avec appétit, et je t’écris avec un plaisir qui naît du prophétique pressentiment que tout finira à la satisfaction de nos cœurs.

Jouis d’une consolation durable dans cette pensée que tu as si délicatement exprimée, que le meilleur des êtres ne peut combiner une telle suite d’événemens, purement dans l’intention de rendre misérable pour la vie sa créature affligée ! L’observation est juste, bonne et bien appliquée… Je souhaite que ma mémoire en justifie l’expression…

Eliza, qui vous apprit à écrire d’une manière si touchante ?… Vous en avez fait un art dans sa perfection… Lorsque je manquerai d’argent, et que la mauvaise santé ne permettra plus à mon génie de s’exercer… je pourrai faire imprimer vos lettres, comme les essais d’une infortunée Indienne… Le style en est neuf, et seul il seroit une forte recommandation pour leur débit ; mais leur tournure agréable et facile, les pensées déli-