Page:Sterne - Œuvres complètes, t5-6, 1803, Bastien.djvu/330

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

dans le secret certaines choses qui, dévoilées, auroient fait votre éloge… Il y a une certaine dignité dans la vénérable affliction, qui refuse d’appeler à elle la consolation et la pitié… Vous avez très-bien soutenu ce caractère, et je commence à croire, amie aimable et philosophe, que vous avez autant de vertus que la veuve de mon oncle Tobie. Mon intention n’est pas d’insinuer par-là que mon opinion n’est pas mieux fondée que la sienne le fut sur celles de madame Wadman ; et je ne crois pas possible à un Trim de me convaincre qu’elle est également en défaut ; je suis sûr que tant qu’il me restera une ombre de raison, cela ne sera pas.

En parlant de veuves… je vous en prie, Eliza, si vous l’êtes jamais, ne songez pas à vous donner à quelque riche Nabab… parce que j’ai dessein de vous épouser. Ma femme ne peut vivre long-temps ; elle a déjà parcouru en vain toutes les provinces de France, et je ne connois pas de femme que j’aimasse mieux que vous pour la remplacer… Il est vrai que ma constitution me rend vieux de plus de quatre-vingt-quinze ans, et vous n’en avez que vingt-cinq… La différence est grande ; mais je tâcherai