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elle, elle ne pourra jamais se défaire de leur connoissance, et elle a résolu de rompre avec eux tout-à-la-fois. Elle les connoît ; elle sait bien qu’ils ne sont ni ses amis ni les vôtres, et que le premier usage qu’ils feroient de leur entrée chez elle seroit de vous sacrifier, s’ils le pouvoient, une seconde fois.

Ne permets pas, chère Eliza, qu’elle soit plus ardente pour tes propres intérêts que tu ne l’es pour toi même. Elle me charge de vous réitérer la prière que je vous ai faite de ne pas leur écrire. Vous lui causerez, et à votre Bramine, une peine inexprimable : sois assurée qu’elle a un juste sujet de l’exiger ; j’ai mes raisons aussi ; la première est que je serois on ne peut pas plus fâché si Eliza manquoit de cette force d’ame que Yorick a tâché de lui inspirer…

J’avois promis de ne plus prononcer leur nom désagréable ; et si je n’en avois reçu l’ordre exprès de la part d’une tendre femme qui vous est attachée, et qui vous aime, je n’aurois pas manqué à ma parole. Je t’écrirai demain encore, à toi, la meilleure et la plus aimable des femmes. Je te souhaite une nuit paisible ; mon esprit ne te quittera point pendant ton sommeil. Adieu.