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C’est un coup de vent, dit en l’attrapant, un bachoteur qui se trouvoit là.

La sentinelle étoit un gascon. Il devint furieux, releva sa moustache, et mit son arquebuse en joue.

Dans ce temps-là on ne faisoit partir les arquebuses que par le secours d’une mèche. Le vent, qui fait des choses bien plus étranges, avoit éteint la lanterne de papier d’une vieille femme, et la vieille femme avoit emprunté la mèche de la sentinelle pour la rallumer… Cela donna le temps au sang du gascon de se refroidir, et de faire tourner l’aventure plus avantageusement pour lui… Il courut après le notaire, et se saisit de son castor. C’est un coup de vent, dit-il, pour rendre sa capture aussi légitime que celle du bachoteur.

Le pauvre notaire passa le pont sans rien dire ; mais arrivé dans la rue Dauphine, il se mit à déplorer son sort.

Que je suis malheureux ! disoit-il. Serai-je donc toute ma vie le jouet des orages, des tempêtes et du vent ? Étois-je né pour entendre toutes les injures, les imprécations qu’on vomit sans cesse contre mes confrères et contre moi ? Ma destinée étoit-elle donc de me voir forcé par les foudres de l’église à contracter un mariage avec une femme qui est pire qu’une