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observe son visage… le caractère qui y est tracé… remarque son attitude en t’écoutant, la tournure et l’expression de toute sa personne, et le premier mot qui sortira de sa bouche te donnera le ton que tu dois prendre. Vous composerez sur-le-champ votre harangue, de l’assemblage de toutes ces choses ; elle ne pourra lui déplaire, et passera très-vraisemblablement ; c’est lui qui en aura fourni les ingrédiens.

Hé bien, dis-je, je voudrois déjà avoir fait ce pas-là. Lâche ! un homme n’est-il donc pas égal à un autre sur toute la surface du globe ? Cela est ainsi dans un champ de bataille ; pourquoi cela ne seroit-il pas de même face à face dans le cabinet ? Crois-moi, Yorick, un homme qui ne prend pas cette noble assurance, se manque à lui-même, se dégrade et dément ses propres ressources dix fois sur une que la nature les lui refuse. Présente-toi au duc avec la crainte de la Bastille dans tes regards et dans ta contenance, et sois assuré que tu sera renvoyé à Paris en moins d’une heure sous bonne escorte…

Ma foi, dis-je, je le crois ainsi… Hé bien, par le ciel ! j’irai au duc avec toute l’assurance et toute la gaieté possibles…

Vous vous égarez encore, me dis-je. Un