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LE PLACET.
Versailles.


Je ne voudrois pas, quand je vais implorer la protection de quelqu’un, que mon ennemi vît la situation de mon esprit…… C’est par cette même raison que je tâche ordinairement d’être mon propre protecteur… mais c’étoit par force que je m’adressois au duc de C… ; si c’eût été une action de choix, je suppose que je l’aurois faite tout comme un autre.

Combien de formes de placets, de la tournure la plus basse, mon servile cœur ne conçut-il pas pendant tout le chemin ! Je méritois d’aller à la Bastille pour chacune de ces tournures.

Arrivé à la vue de Versailles, je voulus m’occuper à rassembler des mots, des maximes ; j’essayai des attitudes, des tons de voix pour s’insinuer dans les bonnes grâces de M. le duc. Bon ! disois-je, j’y suis : ceci fera l’affaire. Oui, tout aussi bien qu’un habit qu’on lui auroit fait sans lui prendre la mesure. Sot, continuai-je en m’apostrophant, commence par regarder M. le duc de C.....