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lui dis de descendre pour souper. Je me livrai alors aux plus sérieuses réflexions sur ma situation.

Oh ! c’est ici, mon cher Eugène, que tu sourira au souvenir d’un court entretien que nous eûmes ensemble, presque au moment de mon départ..... Je dois le raconter ici.

Eugène sachant que je n’étois pas plus chargé d’argent que de réflexion, m’avoit pris à part pour me demander combien j’avois. Je lui montrai ma bourse. Eugène branla la tête, et dit que ce qu’il y avoit ne suffiroit pas !… Tiens, tiens, dit-il, en voulant vider la sienne dans la mienne, augmente tes guinées de toutes celles que j’ai..... Mais en conscience j’en ai assez des miennes...... Je t’assure que non. Je connois mieux que toi le pays où tu vas voyager. Cela peut-être, mais vous ne faites pas réflexion, Eugène, lui dis-je en refusant son offre, que je ne serai pas trois jours à Paris sans faire quelque étourderie qui me fera mettre à la Bastille, où je vivrai un ou deux mois entièrement aux dépens du roi...... Oh ! excusez, répliqua-t-il sèchement, j’avais réellement oublié cette ressource.

L’événement dont j’avois badiné alloit probablement se réaliser…