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pect ; voyez cette vaine vapeur disparoître : la flèche de la mort pénètre lentement dans son sein ; elle glace son sang, et dissipe ses esprits.

Ne le craignez plus : approchez-vous de son lit de mort ; ouvrez les rideaux : contemplez-le un instant en silence. Il ne reste donc à celui que son orgueil et quelques flatteries ont mis au rang de Dieux, que ces mains flétries et ces lèvres décolorées.

Ô mon ame ! quels songes t’ont charmée ! combien tu as été cruellement trompée par les objets brillans qui t’éblouissoient, et que tu enviois !

Si l’aspect de notre imperfection naturelle à laquelle l’homme n’est pas maître de remedier, combat tellement sa vanité, que sera-ce des foiblesses et des vices enfantés, chaque jour, dans son cœur ?

Hommes ! regardez-vous un instant, dans ce jour où je vais vous placer. Voyez le plus désobéissant, le plus ingrat, le plus désordonné des êtres, trébuchant chaque jour dans la carrière de la vie, agissant, chaque heure du jour, contre sa propre conviction, ses intérêts et l’intention du créateur, qui ne s’est proposé que son bonheur. Qu’est-ce qui peut lui donner de l’orgueil ? qu’est-ce