Page:Sterne - Œuvres complètes, t1-2, 1803, Bastien.djvu/227

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

commode de les suivre, que de se donner la peine d’en chercher d’autres. — Observez cependant que ces copistes serviles sont vos plus grands historiens.

Voyez d’abord celui-ci. Il est occupé à tirer un caractère dans toute son étendue naturelle, mais dans une attitude opposée à la lumière. — Il gêne, il défigure la personne qu’il veut peindre.

Cet autre vous tient dans la chambre obscure, et vous êtes sûr qu’il ne vous représente qu’avec quelques-unes de vos attitudes les plus ridicules. — Il vous contrefait, vous mutile…

Oh ! que ce n’est point ainsi que j’agirai pour vous décrire le caractère de mon oncle M. Tobie Shandy ! Je donnerois, moi, dans ces erreurs ? Non, non. Aussi suis-je bien résolu de n’emprunter le secours d’aucune machine pour le peindre. — Je ne souffrirai point que mon pinceau se laisse diriger par aucun des instrumens à vent qui aient jamais soufflé en deçà ou au-delà des Alpes. — Je ne déroberai rien à son médecin. Mais son cheval de course, son dada, son cher califourchon, ou, pour parler sans figure, ses caprices, c’est là ce qui me servira à le caractériser.