Page:Sterne - Œuvres complètes, t1-2, 1803, Bastien.djvu/224

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

d’un verre dioptrique, les opérations des mouches à miel. Son ame y paroîtroit à découvert. On observeroit tous ses mouvemens ; ses artifices, ses caprices, ses vertus, ses vices, ses sensations, ses trémoussemens seroient au grand jour : rien n’échapperoit, et l’on n’auroit plus qu’à prendre la plume, et à écrire ce que l’on auroit vu. Mais un biographe sur la planète où nous sommes n’a pas cet avantage. Que n’est-elle comme Mercure ! Nos calculateurs ont trouvé que la chaleur qui règne dans ce pays-là est égale à celle du fer rougi, et elle doit avoir, depuis long-temps, vitrifié le corps des habitans. Ce qui enveloppe leurs ames doit être aussi diaphane, aussi transparent que la glace du miroir le plus clair et le plus poli. Il n’y a du moins que le nœud ombilical, plus épais, qui en doive être excepté. — Le nœud ombilical ? — Oui, madame, et cela est physique. Je défie à la philosophie la plus subtile de me démontrer le contraire. Mais hors ce point, plus sombre, ces ames doivent être tout-à-fait au bivac. — Je ne parle cependant que des jeunes ames. Celles dont les corps, parvenus à la vieillesse, sont plissés par les rides, ne sont pas de même. Les rayons du soleil, en les traversant, souffrent alors une réfrac-