Page:Stern - Mes souvenirs, 1880.djvu/40

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

situations, aux dispositions nouvelles et imprévues de ma vie et de mon âme. Bien plus, dans une maladie grave, au plus fort d’une crise qui pouvait être mortelle, et qui jetait les médecins dans une grande perplexité, j’eus en rêve la révélation du remède qui me sauva : révélation inexplicable chez une personne étrangère comme je l’étais alors aux notions les plus simples de la médecine ; occulte puissance de l’instinct, que les anciens attribuaient aux dieux[1] , et dont la science moderne est forcée de constater quelques exemples qui l’embarrassent. — Je n’omettrai pas non plus l’incroyable prédiction de la devineresse Lenormand (la même qui prédit un trône à madame de Beauharnais), qui me commanda de faire attention à mes songes, et par qui me fut un jour annoncé un avenir dont je ne pouvais avoir la moindre appréhension, à l’heure où je consultais, par passe-temps, l’oracle[2] . Enfin, quand je me remets sous les yeux les moments difficiles et décisifs de ma vie passée, j’y sens la présence invisible, le secours d’un bon génie : une voix, un esprit, comme on voudra l’appeler, qui me voulait du bien, qui s’interposait entre moi et les

  1. « Si j’ai conçu en songe l’idée de me servir de remèdes souvent efficaces, et particulièrement contre mes crachements de sang et mes vertiges…… c’est aux dieux que je le dois, » écrit Marc-Aurèle (chez les Quades, sur les bords du Granua — Pensées. liv. I — XVII.)
  2. Voir la visite à mademoiselle Lenormand. Appendice E.