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J’avais aussi des distractions mondaines. On venait beaucoup me voir au parloir ; et à mesure qu’approchait l’heure où j’allais quitter le couvent, mes jours de congé se multipliaient.

Le parloir se tenait tous les jeudis, présidé par une religieuse qui en avait la surveillance et en faisait les honneurs. La salle du parloir était une des plus spacieuses de l’hôtel Biron, avec de larges fenêtres sur le jardin, de belles boiseries sculptées ; nulle apparence de grilles ni d’autorité. Autour de chaque élève, il se formait un cercle, une conversation animée. D’un cercle à l’autre, il va sans dire qu’on se regardait beaucoup. Les familles qui se rencontraient là, les Vence, les Faudoas, les Clermont-Tonnerre, les Gramont, les Larochejacquelein, les Vogué, les Rougé, les d’Autichamp, les Charnacé, appartenant toutes au même monde aristocratique et royaliste, on en venait à se saluer, à se parler. La religieuse de service allait et venait dans le dédale de ces petits cercles, où se rendaient assidûment un grand nombre de frères, de cousins des pensionnaires ; collégiens, saint-cyriens, polytechniciens, pages, dont les curiosités, les espiègleries et le babil, défiant l’inquisition de la professe, passaient en contrebande derrière son dos, se glissaient entre les plis de son voile, et nous mettaient, à ses dépens, tout en joie.

Dans ces rencontres de frères et de cousins ger-