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à Port[-Sainte-Marie]. Tout-à-coup nous voyons un gros bateau chargé qui avait passé à côté de nous en descendant le cours de la rivière se rapprocher de nous rapidement. Tous les bateliers crient ; enfin la pointe de ce bateau vient casser nos vitres des fenêtres de l’arrière. Nos roues ont rencontré une corde attachée à ce malheureux bateau et qui flottait dans la rivière ; elles l’ont accrochée, l’ont rapidement dévidée, enfin la corde a passé à côté de nous en ratissant la balustrade du bateau, et quand les deux bateaux se sont touchés, elle a cassé. Pendant les quatre minutes d’anxiété, les mariniers, entièrement occupés de ce singulier accident ont oublié la chaudière qui heureusement, au lieu d’éclater, s’est contentée de mettre le feu au bateau. Les bateliers, occupés à éteindre le feu, s’écriaient :

« Nous retournons à Nantes, nous ne pouvons plus manœuvrer. » Les passagers sont accourus vers la chaloupe ; le bateau était couvert de flots de fumée blanche. Tout-à-coup, il a repris sa marche : on avait pu éteindre l’incendie sans vider la chaudière. Mais grand Dieu, quelle marche ! Nous n’avons pu gagner Agen qu’à dix heures du soir et ordinairement on y arrive à cinq.

Un riche propriétaire des environs,