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Louis était jaloux, Aliénor coquette ; la mésintelligence commença en Palestine où cette princesse aimable avait voulu suivre son mari. Le fameux Saladin fit prisonnier Sandebeuil de Sansai que la reine aimait tendrement. Aliénor écrivit au sultan pour lui demander sa rançon ; une somme considérable partit en même temps que la lettre. Saladin méritait l’énorme célébrité que les romans lui ont donnée : il renvoya à Antioche la somme et le prisonnier. Louis le Jeune se figura qu’il était amoureux d’Aliénor. Cette princesse, ennuyée d’un tel mari, lui proposa la dissolution de leur mariage, sous prétexte de parenté. Louis le Jeune se persuadait que Saladin entrait déguisé dans Antioche et voyait la reine en secret.

Les époux revinrent en France. Le fameux Suger, abbé de Saint-Denis et régent du royaume en l’absence du roi, vit le danger de ce divorce et parvint d’abord à l’empêcher. Mais Henri, comte d’Anjou et héritier présomptif de la couronne d’Angleterre, vint à la cour de France et fit la cour à la reine. Elle lui dit qu’elle avait remarqué les sentiments qu’il avait pour elle, mais qu’il fallait en dérober avec soin la connaissance jusqu’à ce qu’ils pussent paraître avec bienséance, qu’il fallait qu’il se retirât dans l’Anjou où