— Bordeaux, 7 avril.
Ce n’est pas précisément de l’amour que j’ai pour Montesquieu, c’est de la vénération ; il ne m’ennuie jamais en allongeant ce que je comprends déjà. Je suis allé à La Brède ce matin. En y arrivant j’ai été saisi d’un respect d’enfant, comme jadis en visitant Potsdam et touchant le chapeau percé d’une balle de Frédéric II. Ce jour de La Brède marquera dans ma vie ; ordinairement la visite d’un palais de roi ne m’inspire que l’envie de me moquer.
La terre de La Brède où Montesquieu était né, mais qu’il mit en culture et augmenta, est située sur l’extrême bord des terres cultivées, à droite de la route de Bordeaux à Bazas et Bayonne. Un peu plus loin, on entre dans ce vaste désert de
sans avoir fait auparavant la plus petite démarche auprès des dames qui étaient à la tête de ce bal.
Dans une époque où la France brillait par la pensée, en 1738 peut-être, la manière d’être de Bordeaux la rendrait inférieure ; dans une époque d’ambition où l’hypocrisie
est utile dans toutes les carrières le caractère resté franc
du Bordelais lui aurait peut-être la première place en France.
Chose plaisante et encore plus absurde que plaisante,
ce sont les hommes qui donnent cours à l’affreux qu’en dira-t-on
qui tyrannise Bordeaux et en chasse les agréments
de la vie. 13 avril.