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Deux faits principaux vinrent, au milieu du xviiie siècle, mettre un dièse à la clé de la mélodie que nous venons d’indiquer : l’esprit devint à la mode. Le maréchal de Richelieu, gouverneur de la Guyenne pendant de longues années, qui fut roi absolu à Bordeaux et, malgré le Parlement, fit bâtir la salle de spectacle, montra qu’il y avait quelque chose d’agréable à joindre aux bons dîners : c’était l’esprit de répartie et les grâces d’une galanterie aimable et que l’on ne pouvait trouver auprès des demoiselles payées. Un jour Bordeaux apprit de Paris que le président de Montesquieu, qu’elle regardait comme un juge ordinaire, paresseux et bizarre, était un grand homme. Cela fit réfléchir les jeunes avocats. Montesquieu était mort en 1755 ; dix ans après se formaient à Bordeaux ces jeunes gens si éloquents, si généreux, si connus sous le nom de Girondins, Guadet, etc… auxquels les Bordelais, redevenus simples négociants et viveurs, n’ont pas élevé une statue et [qu’ils] n’ont pas même honorés, en donnant leur nom à la rue dans laquelle ils vivaient.

Il y a une excuse ; on ne trouve plus à Bordeaux les familles des Bordelais qui vivaient en 1792 ; on dirait que les contemporains de Vergniaud n’ont pas laissé d’enfants.