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LETTRE VII

Vienne, 3 octobre 1808


Jentrais une fois en Italie par le Simplon ; j’avais avec moi quelqu’un qui n’avait jamais fait ce voyage, et passant à un quart de lieue des îles Borromées, je fus bien aise de les lui faire voir. Nous prîmes une barque, nous courûmes les jardins de ce lieu magnifique et cependant touchant. Nous revînmes enfin à la petite auberge de l’Isola Bella : nous vîmes qu’on mettait trois couverts à une table, et un jeune Milanais, dont l’extérieur annonçait beaucoup d’aisance, vint s’asseoir à côté de nous, en nous faisant quelques politesses. Il répondait très-bien aux questions que je lui adressais. Comme il était occupé à découper une perdrix, mon ami tira une lettre de sa poche, et, faisant semblant de lire, il me dit en anglais : « Mais voyez donc ce jeune homme ! sans doute il a commis quelque crime dont l’idée le poursuit : voyez les regards qu’il lance sur nous ; il