Page:Stendhal - Vies de Haydn, de Mozart et de Métastase, 1928, éd. Martineau.djvu/75

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

un asile. Keller le reçut comme un fils, partageant avec lui son petit ordinaire, et chargeant sa femme du soin de le vêtir.

Haydn, délivré de tous soins temporels, établi dans la maison obscure du perruquier, put se livrer, sans distraction, à ses études, et faire des progrès rapides. Ce séjour eut cependant une influence fatale sur sa vie : les Allemands ont la manie du mariage. Chez un peuple doux, aimant et timide, les jouissances domestiques sont de première nécessité. Keller avait deux filles ; sa femme et lui songèrent bientôt à en faire épouser une au jeune musicien ils lui en parlèrent : lui, tout absorbé dans ses méditations, et ne pensant point à l’amour, ne se montra pas éloigné de ce mariage. Il tint parole dans la suite avec cette loyauté qui était la base de son caractère, et cette union ne fut rien moins qu’heureuse.

Ses premières productions furent quelques petites sonates de piano, qu’il vendait à vil prix à ses écolières, car il en avait trouvé quelques-unes : il faisait aussi des menuets, des allemandes et des valses pour le Ridotto. Il écrivit, pour se divertir, une sérénade à trois instruments, qu’il allait, dans les belles nuits d’été, exécuter en divers endroits de Vienne, accompagné de deux de ses amis. Le théâtre de