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LETTRE V

Bade, 28 août 1808

Mon ami,


Les ravages du temps vinrent déranger la petite fortune de Haydn. Sa voix changea, et il sortit à dix-neuf ans de la classe des soprani de Saint-Étienne, ou pour mieux dire, et ne pas tomber sitôt dans le style du panégyrique, il en fut chassé. Un peu impertinent, comme tous les jeunes gens vifs, un jour il s’avisa de couper la queue de la robe d’un de ses camarades, crime qui fut jugé impardonnable. Il avait chanté onze ans à Saint-Étienne : le jour qu’il en fut chassé, il ne se trouva, pour toute fortune, que son talent naissant, pauvre ressource quand elle est inconnue. Il avait cependant un admirateur. Forcé de chercher un logement, le hasard lui fit rencontrer un perruquier nommé Keller, qui avait souvent admiré, à la cathédrale, la beauté de sa voix, et qui, en conséquence, lui offrit