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ans, composa un opéra applaudi, Haydn, à cet âge, fit une messe dont le bon Reüter se moqua avec raison. Cet arrêt étonna le jeune homme ; mais déjà plein de raison, il comprit sa justice : il sentit qu’il fallait apprendre le contre-point et les règles de la mélodie ; mais de qui les apprendre ? Reüter n’enseignait pas le contre-point[1] aux enfants de chœur, et n’en a jamais donné que deux leçons à Haydn. Mozart trouva un excellent maître dans son père, violon estimé. Il en était autrement du pauvre Joseph, enfant de chœur abandonné dans Vienne, qui ne pouvait avoir de leçons qu’en les payant, et qui n’avait pas un sou. Son père, malgré ses deux métiers, était si pauvre, que, Joseph ayant été volé de ses habits, et ayant mandé ce malheur à sa famille, son père, faisant un effort, lui envoya six florins pour remonter sa garde-robe.

Aucun des maîtres de Vienne ne voulut donner de leçons gratis à un petit enfant de chœur sans protection : c’est peut-être à ce malheur que Haydn doit son originalité. Tous les poëtes ont imité Homère, qui n’imita personne : en cela seulement il n’a pas été suivi, et c’est peut-être à cela surtout qu’il doit d’être le grand poëte que

  1. C’est l’art de la composition.