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de sa musique. Vous me pardonnerez les détails, il s’agit d’un de ces génies qui, par le développement de leurs facultés, n’ont fait autre chose au monde qu’augmenter ses plaisirs, et fournir de nouvelles distractions à ses misères ; génies vraiment sublimes, et auxquels le vulgaire stupide préfère les hommes qui se font un nom en faisant entre-battre quelques milliers de ces tristes badauds.

Le parnasse musical comptait déjà un grand nombre de compositeurs célèbres, quand, dans un village de l’Autriche, vint au monde le créateur de la symphonie. Les études et le génie des prédécesseurs de Haydn avaient été dirigés vers la partie vocale, qui, dans le fait, forme la base des plaisirs que peut nous donner la musique ; ils n’employaient les instruments que comme un accessoire agréable : tels sont les paysages dans les tableaux d’histoire, ou les ornements en architecture.

La musique était une monarchie : le chant régnait en maître ; les accompagnements n’étaient que des sujets. Ce genre, où l’on ne fait pas entrer la voix humaine, cette république de sons divers et cependant réunis, dans laquelle tour à tour chaque instrument peut attirer l’attention, avait à peine commencé à se montrer vers la fin du dix-septième siècle,