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latifs, qui m’ennuient, éveillent peut-être l’amour de l’art chez un jeune tailleur de Bologne, qui un jour, sera un Annibal Carrache. Ces superlatifs-là sont un peu comme les signes de respect que l’on rend au marquis de Wellington lorsqu’il passe dans les rues de Lisbonne : certainement le petit clerc de procureur qui crie e viva ! ne peut pas juger des talents militaires et de la prudence sublime de cet homme rare ; mais, n’importe, ces cris-là sont pour lui une récompense de ses vertus, et feront peut-être un autre Wellington de ce jeune capitaine qui est son aide de camp.

Le personnage le plus estimé, le plus connu dans Rome, c’est Canova. Le peuple d’un quartier de Paris connaît monsieur le duc un tel, dont l’hôtel est au bout de la rue. Il n’en faut pas davantage pour voir que vous avez beau emporter à Paris la Transfiguration et l’Apollon ; vous avez beau faire transporter sur toile la Descente de croix peinte à fresque par Daniel de Volterre, toutes ces œuvres sont des œuvres mortes : il manque à vos beaux-arts un public.

Ayez un Opéra italien, ayez un Musée ; c’est fort bien : vous pourrez parvenir peut-être à acquérir, dans ces genres-là, un goût d’une belle médiocrité ; mais vous ne serez jamais grands que dans la comédie,