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que les hommes le plus heureusement nés n’ont rencontré que dans quelques moments fortunés de leur existence : Saint-Preux arrivant dans la chambre de Julie.

Les gens raisonnables qui ne sont pas rebutés par l’amertume de Tacite et d’Alfieri ; qui, à peine sensibles à la musique, sont bien loin de soupçonner le but de cet art charmant ; qui, non sensibles à ces mille pointes qui, dans la vie réelle, viennent, à chaque instant, percer l’âme tendre, ou, ce qui est bien pis, la replonger dans la plate réalité ; ces gens-là, dis-je, ont appelé, dans Métastase, manque de vérité ce qui est le comble de l’art. C’est l’effet d’un art, puisque c’est une condition nécessaire pour obtenir un certain plaisir. C’est comme si l’on blâmait le sculpteur qui fit l’Apollon du Belvédère d’avoir omis les petits détails de muscles que l’on voit dans le Gladiateur et dans les autres statues qui ne représentent que des hommes. Tout ce que l’on peut dire de vrai, c’est que le plaisir que donne un opéra de Métastase n’est pas senti dans le pays situé entre les Alpes, le Rhin et les Pyrénées. Je crois voir un Français, homme d’esprit, bien sûr de ce qu’il doit dire sur tout ce qui peut occuper l’attention d’un homme du monde, arrivant dans le palais du Vatican, à ces délicieuses loges