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d’état d’aller au théâtre, il plaçait sa montre à côté de lui, et semblait suivre l’orchestre dans sa pensée : « Voilà le premier acte terminé, disait-il ; maintenant on chante tel ou tel air, etc » ; puis il était de nouveau saisi de l’idée que bientôt il serait obligé de quitter tout cela.

Un événement assez singulier vint accélérer l’effet de cette funeste disposition. Je prie qu’on me permette de rapporter cet événement avec détails, parce qu’on lui doit le fameux Requiem, qui passe, avec raison, pour un des chefs-d’œuvre de Mozart.

Un jour qu’il était plongé dans une profonde rêverie, il entendit un carrosse s’arrêter à sa porte. On lui annonce un inconnu qui demande à lui parler : on le fait entrer ; il voit un homme d’un certain âge, fort bien mis, les manières les plus nobles, et même quelque chose d’imposant : « Je suis chargé, monsieur, pour un homme très considérable, de venir vous trouver. — Quel est cet homme ? interrompit Mozart. — Il ne veut pas être connu. — À la bonne heure ! et que désire-t-il ? — Il vient de perdre une personne qui lui était