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se mit à lui raconter des contes de fées, des aventures bizarres, qui le firent pleurer à force de rire. Cependant le punch l’excita au sommeil, de sorte qu’il ne travaillait que pendant que sa femme racontait, et il fermait les yeux dès qu’elle s’arrêtait. Ses efforts pour se tenir éveillé, cette alternative continuelle de veille et de sommeil, le fatiguèrent tellement, que sa femme l’engagea à prendre quelque repos, lui donnant sa parole de le réveiller une heure après. Il s’endormit si profondément qu’elle le laissa reposer deux heures. Elle l’éveilla vers les cinq heures du matin. Il avait donné rendez-vous aux copistes à sept heures, et, à leur arrivée, l’ouverture était finie. Ils eurent à peine assez de temps pour faire les copies nécessaires à l’orchestre, et les musiciens furent obligés de jouer sans avoir fait de répétition. Quelques personnes prétendent reconnaître dans cette ouverture les passages où Mozart doit avoir été surpris par le sommeil, et ceux où il s’est réveillé en sursaut.

Don Juan ne fut pas très bien accueilli à Vienne dans la nouveauté. Peu de temps après la première représentation, on en parlait dans une assemblée nombreuse où se trouvaient la plupart des connaisseurs de la capitale, et entre autres Haydn.