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avec les paroles italiennes de Carpani. Cent soixante musiciens se réunirent chez M. le prince Lobkowitz.

Ils étaient secondés par trois belles voix, Madame Frischer de Berlin, MM. Weitmüller et Radichi. Il y avait plus de quinze cents personnes dans la salle. Le pauvre vieillard voulut, malgré sa faiblesse, revoir encore ce public pour lequel il avait tant travaillé. On l’apporta sur un fauteuil dans cette belle salle, pleine en ce moment de cœurs émus. Madame la princesse Esterhazy, et madame de Kurzbeck, amie de Haydn, vont à sa rencontre. Les fanfares de l’orchestre, et plus encore l’attendrissement des assistants, annoncent son arrivée. On le place au milieu de trois rangs de sièges destinés à ses amis et à tout ce qu’il y avait alors d’illustre à Vienne. Salieri, qui dirigeait l’orchestre, vient prendre les ordres de Haydn avant de commencer. Ils s’embrassent ; Salieri le quitte, vole à sa place, et l’orchestre part au milieu de l’attendrissement général. On peut juger si cette musique, toute religieuse, parut sublime à des cœurs pénétrés du spectacle d’un grand homme quittant la vie. Environné des grands, de ses amis, des artistes, de femmes charmantes dont tous les yeux étaient fixés sur lui, écoutant les louanges de Dieu