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Il faut avouer que rien n’est d’un plus grand effet. Avant ce mot du Créateur, le musicien diminue peu à peu les accords, introduit l’unisson et le piano toujours plus adouci à mesure qu’approche la cadence suspendue, et fait enfin éclater cette cadence de la manière la plus sonore à ces mots :

Voilà le jour.

Cet éclat de tout l’orchestre dans le ton résonnant de C sol fa ut, accompagné de toute l’harmonie possible, et préparé par cet évanouissement progressif des sons, produisit vraiment à nos yeux, à la première représentation, l’effet de mille flambeaux portant tout à coup la lumière dans une caverne sombre.

Les anges fidèles décrivent ensuite, dans un morceau fugué, la rage de Satan et de ses complices, précipités dans un abîme de douleurs, et par la main de celui qu’ils détestent. Ici Milton a un rival. Haydn répand à profusion tout le disgracieux du genre enharmonique, l’horreur des dissonances, le jeu des modulations étranges et des accords de septième diminuée. L’âpreté des paroles tudesques ajoute encore à l’horreur de ce chœur. On frissonne, mais la musique se met à décrire les beautés