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citer, le mélange du style grave et fugué de la musique d’église et du style clair et expressif de celle de théâtre. Les oratorios de Hændel et de Marcello ont des fugues presque à chaque scène ; Weigl en a usé de même dans son superbe oratorio de la Passion : les Italiens de nos jours, au contraire, ont rapproché extrêmement l’oratorio de l’opéra. Haydn voulut suivre les premiers ; mais ce génie ardent ne pouvait sentir d’enthousiasme qu’autant qu’il créait.

Haydn était ami du baron de Van Swieten, bibliothécaire de l’empereur, homme très savant, même en musique, et qui composait assez bien : ce baron pensait que la musique, qui sait si bien exprimer les passions, peut aussi peindre les objets physiques, en réveillant dans l’âme des auditeurs les émotions que leur donnent ces objets. Les hommes admirent le soleil ; donc, en peignant le plus haut degré de l’admiration, on leur rappellera l’idée du soleil. Cette manière de conclure peut paraître un peu légère, mais M. de Van Swieten y croyait fermement. Il fit observer à son ami que, quoique l’on rencontrât dans les œuvres des grands maîtres quelques traits épars de ce genre descriptif, cependant ce champ restait tout entier à moissonner. Il lui proposa d’être le Delille