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rés, vous venez à entendre une des messes de Haydn, vous vous sentez d’abord troublé, et ensuite enlevé par ce mélange de gravité, d’agrément, d’air antique, d’imagination et de piété qui les caractérise.

En 1799 j’étais à Vienne, malade de la fièvre ; j’entends sonner une grand’messe dans une église voisine de ma petite chambre : l’ennui l’emporte sur la prudence ; je me lève, et vais écouter un peu de musique consolatrice. Je m’informe en entrant ; c’était le jour de Sainte-Anne, et on allait exécuter une messe de Haydn, en B fa, que je n’avais jamais entendue. Elle commençait à peine que je me sentis tout ému, je me trouvai en nage, mon mal à la tête se dissipa : je sortis de l’église au bout de deux heures, avec une hilarité que je ne connaissais plus depuis longtemps, et la fièvre ne revint pas.

Il me semble que beaucoup de maladies de nos femmes nerveuses pourraient être guéries par mon remède, mais non par cette musique sans effet qu’elles vont chercher dans un concert après avoir mis un chapeau charmant. Les femmes toute leur vie, et nous-mêmes tant que nous sommes jeunes, nous ne donnons une pleine attention à la musique qu’autant que nous l’entendons dans l’obscurité. Dégagés du soin de paraître aimables, n’ayant plus de