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qui est contraire aux règles, peut-elle être la meilleure ? — Parce qu’elle est la plus agréable. » Le lord répliquait ; Haydn répondait du mieux qu’il pouvait ; mais enfin, impatienté : « Je vois, milord, que c’est vous qui avez la bonté de me donner des leçons, et je suis forcé de vous avouer que je ne mérite pas l’honneur d’avoir un tel maître. » Le partisan des règles sortit, et est encore étonné qu’en suivant les règles à la lettre on ne fasse pas infailliblement un Matrimonio segreto.

Un marin entra un matin chez Haydn : « Vous êtes M. Haydn ? — Oui, monsieur. — Vous convient-il de me faire une marche pour égayer les troupes que j’ai à mon bord ? Je vous payerai trente guinées, mais il me faut la marche aujourd’hui, parce que je pars demain pour Calcutta. » Haydn accepte. Le capitaine de vaisseau sorti, il ouvre son piano, et en un quart d’heure fait la marche.

Ayant des scrupules d’avoir gagné si vite une somme qui lui semblait très-forte : il rentre de bonne heure le soir, et fait deux autres marches, dans le dessein de laisser le choix au capitaine, et ensuite de les lui offrir toutes les trois pour répondre à sa générosité. Au point du jour arrive le capitaine ? « Eh bien, ma marche ? — La voici. — Voulez-vous la jouer sur le