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que j’ai senti bien souvent en écoutant les plus belles symphonies d’Haydn, et cherchant à lire dans mon âme la manière dont elles parvenaient à me plaire. Je distinguais d’abord ce qui est commun entre elles, ou le style général qui y règne.

Je cherchais ensuite les ressemblances que ce style pouvait avoir avec celui de maîtres connus. On y trouve quelquefois mis en pratique les préceptes donnés par Bach ; on voit que, pour la conduite et le développement du chant des divers instruments, l’auteur a pris quelque chose dans Fux et dans Porpora ; que, pour la partie idéale, il a développé de très-beaux germes d’idées contenus dans les ouvrages du Milanais Sammartini et de Jomelli.

Mais ces légères traces d’imitation sont loin de lui ôter le mérite incontestable d’avoir un style original, et digne de produire, ainsi qu’il est arrivé, une révolution totale dans la musique instrumentale. C’est ainsi qu’il n’est pas impossible que l’aimable Corrége ait pris quelques idées du clair-obscur[1] sublime qui fait le charme de la Léda, du Saint Jérôme, de la Madonna alla scodella, dans les tableaux

  1. Les Français sont absolument insensibles au clair-obscur. Ils comprennent fort bien le dessin et la composition. Toujours âme glacée et esprit vif. (Note manuscrite de l’ex. Mirbeau.)