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le reprend, lui donne un air de nouveauté, tantôt lui fait revêtir une certaine âpreté, tantôt l’embellit d’une manière délicate, et toujours donne à l’auditeur surpris le plaisir de le reconnaître sous un déguisement agréable. Vous que les symphonies de Haydn ont frappé, je suis sûr que si vous avez suivi ce pathos, vous avez actuellement présents à la pensée ses admirables andante.

Au milieu de ce torrent d’idées, Haydn sait ne jamais sortir de ce qui semble naturel ; il n’est jamais baroque : tout est chez lui à la place la plus convenable.

Les symphonies de Haydn, comme les harangues de Cicéron, forment un vaste arsenal où se trouvent rassemblées toutes les ressources de l’art. Je pourrais, avec un piano, vous faire distinguer bien ou mal douze ou quinze figures musicales, aussi différentes entre elles que l’antithèse et la métonymie[1] de la rhétorique ; mais je ne vous ferai remarquer que les suspensions.

Je parle de ces silences imprévus de tout l’orchestre, quand Haydn, parvenu, dans la cadence du période musical, à la dernière note qui résout et ferme la phrase,

  1. Grands mots que Pradon prend pour termes de chimie.
    Boileau.