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différents de celui de l’acteur en scène ; mais que ne pardonnerait-on pas en faveur du chant de l’orchestre, vers le milieu de l’air

Vedrò mentr’io sospiro
Felice un servo mio !
Figaro.

chant divin, et que tout homme qui souffre d’amour se rappelle involontairement[1].

Les dissonances sont, en musique, comme le clair-obscur en peinture : il ne faut pas en abuser. Voyez la Transfiguration et la Communion de saint Jérôme, placées vis-à-vis l’une de l’autre à votre Musée de Paris ; il manque un peu de clair-obscur à la Transfiguration ; le Dominiquin, au contraire, en a fait le meilleur usage : c’est là qu’il faut s’arrêter, ou vous tombez dans la secte des tenebrosi, qui, au sei-

  1. Je ne me fais pas un scrupule de prendre mes exemples dans la musique que j’ai entendue à Paris depuis ma rentrée en France, et postérieurement à la date de ces lettres. Il n’est pas permis à tout le monde d’imiter un grand écrivain, qui, cherchant à donner à son ami une idée exacte du pays désert qu’il faut traverser pour arriver à Rome, lui dit :
    « Vous avez lu, mon cher ami, tout ce qu’on a écrit sur ce pays, mais je ne sais si les voyageurs vous en ont donné une idée bien juste… Figurez-vous quelque chose de la désolation de Tyr et de Babylone, dont parle l’Écriture. » Génie du Christianisme, tom. III, p. 367.
    Citer à Paris la plupart des chefs-d’œuvre de Pergolèse, de Galuppi, de Sacchini, etc., ce serait un peu parler des plaines de Babylone.